Lionel Tribollet cueille les fruits abandonnés
© Philippe Bourget

C’est en faisant du vélo sur les routes du Luberon que Lionel Tribollet a imaginé son projet. « Je voyais beaucoup d’arbres dont les fruits n’étaient jamais ramassés. J’ai compris qu’il y avait un potentiel de valorisation », explique ce Toulousain marié avec Morgane, une « locale » propriétaire de quatre chambres d’hôtes. En 2016, après un congé parental, il se rapproche de l’association Fruits d’Avenir, à Digne (Alpes-de-Haute-Provence), qui le forme au pressage.
Il investit ensuite dans un broyeur, un pressoir, une unité de pasteurisation, une remorque et un véhicule d’occasion pour un total de 15 000 €. « J’ai fait avec les moyens du bord et avec l’aide d’un prêt d’honneur à taux zéro de 3 000 € accordé par Initiative Luberon (réseau associatif de financement des créateurs d’entreprises). Ici, il y a des exploitants qui ne peuvent pas valoriser leurs fruits à presser car les structures d’achat exigent de gros volumes. Il y a aussi ceux dont les fruits sont abîmés ou pas calibrés pour la vente en bouche. Ils m’appellent pour élargir leur offre et vendre leurs jus à la ferme, en magasins locaux ou sur les marchés », dit-il. Au total, une vingtaine de producteurs lui fait confiance, dans un rayon de 30 km autour de Roussillon.

Pommes, cerises, raisins…

© Philippe Bourget

Labellisé transformateur bio (la certification lui coûte 700 € par an), Lionel est contacté par l’agriculteur, qui a déjà ramassé les fruits, ou mobilise des bras pour le faire. Le pressage et la pasteurisation ont lieu sur place. Le prix est fixé à la bouteille, 1,55 € pour 1 l, 0,82 € pour 25 cl… 200 kg de fruits produisent environ 140 l de jus, aussitôt pasteurisé. « La valeur sûre ici, c’est la pomme. On peut presser d’août à décembre. Après, ce sont les cerises, les raisins de table, les poires, les abricots… »
Le presseur est un passeur. « Faire du jus, cela crée du lien social. J’aimerais venir sur les places de villages presser les fruits des habitants », dit-il. En attendant, il n’hésite pas à faire du troc et à glaner lui-même. « En échange du ramassage, je garde 90 % du jus et le vend sous la marque Jus Pur Lub, notamment à nos clients des chambres d’hôtes. » Sous un statut de microentreprise, son activité équivaut à un mi-temps annualisé, qu’il complète avec la gestion des chambres d’hôtes.

Philippe Bourget, mai 2019