Depuis plus de dix ans, l’école de L’Hospitalet-près-l’Andorre (Ariège) est menacée de fermeture. Pour ne pas devenir un village fantôme, la commune située aux portes de l’Andorre s’est mobilisée pour attirer de nouvelles populations. À coup d’opérations immobilières d’abord, puis en accueillant des mères en difficulté.
Un matin de mai. Des enfants haut comme trois pommes remontent la ruelle qui mène à l’école. Cette scène ordinaire de la vie d’un village, l’Hospitalet-près-l’Andorre a bien failli en être privée. En 2004, l’école de cette commune de montagne perchée à 1200 mètres d’altitude est menacée de fermeture. La faute à des effectifs scolaires trop maigres, à l’inévitable déclin démographique d’un village frontalier qui a perdu tour à tour ses mineurs, sa gendarmerie, ses douaniers, ses transitaires, quelques agents EDF et employés SNCF… « À cette époque, avec les parents, nous avons organisé des manifestations, bloqué la RN 20, et non sans mal, constitué un RPI (Regroupement pédagogique intercommunal) », se souvient Marianne Duchêne, la très dynamique institutrice.
Pour faire vivre l’école, la commune, dans le sillage de l’institutrice et du nouveau maire, Arnaud Diaz, alors âgé de 32 ans, est convaincue qu’il faut aller de l’avant. En 2010, la mairie contracte un emprunt de 500 000 € et rachète puis rénove quinze appartements qu’occupaient les douaniers avant leur départ définitif en 2005. S’en suit une campagne médiatique, des lettres déposées dans les boîtes aux lettres et en retour, plusieurs dizaines de candidats à l’installation séduits par les loyers très modérés (à partir de 417 € pour un T3, chauffage compris). Grâce à cette première campagne la population grimpe de 85 à 120 habitants. Certains des nouveaux arrivants s’installent durablement. D’autres peinent à s’adapter à la vie montagnarde et s’en vont.
« La voie de la solidarité, de l’hospitalité »
« Un soir, avec les deux institutrices du RPI Marianne Duchêne et Marie-Pierre Ardourel, nous discutions de l’avenir de l’école. Nous étions un peu moroses, les effectifs chutaient, raconte Arnaud Diaz. C’est alors qu’on a eu l’idée de la Maison des Cimes, une structure pour accueillir des mamans en difficulté, une pension qui servirait de tremplin entre la sortie des centres d’hébergements temporaires et le logement autonome. » Contre vents et marées, la commune porte ce projet, le défend auprès des ministères, des collectivités locales. Et après cinq ans de combat, le chantier démarre enfin en 2018. Pour 65 000 €, la mairie rachète une belle bâtisse. 500 000 € de travaux, financés à 80 % par l’Europe, la région, le département et la communauté de communes, sont engagés pour pouvoir héberger six mamans et neuf enfants. « Chaque famille aura un appartement. Au rez-de-chaussée, il y aura un vaste espace de vie en commun, ouvert aussi aux habitants du village où nous pourrons développer des ateliers et des formations. » À compter de septembre, les premières mamans s’installeront dans la Maison des Cimes qui sera gérée par l’association France Horizon (gestionnaire d’établissements et de services sociaux et médico-sociaux), avec le soutien notamment de la CAF et du Service Intégré d’Accueil et d’Orientation (SIAO) qui placera les mamans. Ces dernières devront être célibataires, avec des enfants de moins de onze ans. Elles pourront y rester entre 12 et 24 mois. Grâce à deux employés à plein temps, elles bénéficieront d’une aide à la parentalité, à la reconstruction personnelle, mais aussi d’un projet professionnel. Quant aux enfants, ils garniront les bancs de l’école, placé au cœur du projet. « On aurait pu construire un village de vacances, avance Arnaud Diaz. Mais nous avons choisi une autre voie. » Celle de la solidarité, de l’hospitalité.