Honni des jardiniers qui le trouvent envahissant, le chénopode blanc pousse partout à l’état sauvage et se cuisine comme les épinards dont il rappelle la saveur. Une délicieuse « mauvaise herbe » à découvrir dès la fin du printemps.
Par Stéphane Perraud – Photos : Flavia Sistiaga
II s’invite volontiers au potager et peut très vite prendre toute la place. Beaucoup de jardiniers considèrent le chénopode blanc comme une adventice à arracher au plus vite. Comme il entre en concurrence avec les autres plantes, il faut effectivement le réguler. Mais son délicieux goût d’épinard fait merveille en cuisine. En milieu sauvage, il prend aussi rapidement ses aises en produisant des milliers de graines par pied et permet de belles cueillettes jusqu’à sa floraison au cœur de l’été.
Le reconnaître
Son nom dit tout de son apparence. Chénopode vient du grec ancien chéna (oie) et podi (pied). Ses feuilles dentelées sont effectivement en forme de patte d’oie. Sous celles-ci, on découvre une petite poudre blanche qui reste sur les doigts quand on la gratte. Ce sont de minuscules cristaux de silice. Les feuilles poussent de façon alternée sur une tige anguleuse, parfois rougeâtre, striée de blanc, qui peut dépasser un mètre de haut. Ses fleurs, minuscules, apparaissent sous forme de grappes aux tépales vert clair, à partir de juillet. Cette plante annuelle rustique se plaît dans les sols riches, avec une préférence pour ceux qui viennent d’être retournés, mais aussi les friches et les bords de chemin.
Propriétés et précautions d’emploi
Le chénopode blanc se consomme en petite quantité car il contient de l’acide oxalique et des saponines, toxiques à haute dose, comme l’oseil-le ou la rhubarbe. À déconseiller aux personnes souffrant de calculs rénaux, aux arthritiques, aux hépatiques et aux rhumatisants. Pour les autres, ne vous en privez pas ! Consommée depuis le Néolithique, cette plante est très riche en sels minéraux (calcium, potasse, fer) et en vitamines B1, B2, PP et C. Privilégiez les jeunes feuilles et les sommités avant floraison, moins riches en acide oxalique et moins fibreuses.
Le cuisiner
Un peu oublié en France, le chénopode est très prisé en Italie, en Pologne, au Japon ou au Mexique dans plusieurs plats traditionnels. « Je trouve son goût plus intense, plus concentré, mais aussi plus subtil que l’épinard. Il est dénué d’amertume, explique Titiane Haton, autrice du livre “Cuisiner les plantes sauvages du jardin”. J’en prépare de petites poêlées que j’associe à de la polenta. J’aime aussi glisser quelques feuilles dans les omelettes ou les tartes salées. Enfin, dans un pesto mélangé à d’autres plantes, le chénopode ralentit l’oxydation grâce à l’acide oxalique qu’il contient. » Outre les feuilles, on peut consommer les jeunes pousses florifères, comme des asperges. Si le haut de la tige se casse facilement, c’est qu’elle est jeune et non fibreuse.
La recette de Titiane : L’assiette tricolore « polenta-tomate-chénopode »
Dans une poêle, faites dorer une échalote avec une cuillère à soupe d’huile d’olive. Ajoutez quatre belles poignées de feuilles de chénopode, faites revenir quelques minutes et complétez avec deux cuillères à̀ soupe d’eau. Couvrez et laissez cuire à feu doux 8 minutes en remuant régulièrement. Ajoutez un peu d’eau si nécessaire pour éviter que cela attache. Dans une casserole, faites bouillir environ 100 cl d’eau salée. À ébullition, réduisez le feu, ajoutez une cuillère à soupe d’huile d’olive et versez progressivement 200 g de polenta instantanée tout en remuant au fouet pendant 5 minutes. Dans une assiette, déposez d’abord la polenta, recouvrez de sauce tomate chaude et versez à côté la poêlée de chénopode. Les trois saveurs se complètent à merveille.
La recette ci-dessus est tirée du livre Cuisiner les plantes sauvages du jardin, de Titiane Haton, Ed. Ulmer, 126 p., 2024, 16,90 €.