Au pays des volcans, acteurs du grand et du petit cycle de l’eau se sont réunis pour restaurer une vaste zone humide à quelque 1 300 mètres d’altitude.
Par Axel Puig
À l’horizon, le Signal du Luguet déploie ses formes arrondies. Du haut de ses 1 551 mètres, il toise un plateau granitique façonné par les glaces et les laves. Situé au cœur du Parc naturel régional des volcans d’Auvergne, le Cézallier est un petit pays copieusement arrosé par les pluies dont les nombreuses sources se déversent dans la Loire ou l’Allier. Sur la commune d’Anzat-le-Luguet, celles du Rayet alimentent en eau potable près de 15 000 habitants du Puy-de-Dôme, du Cantal et de la Haute-Loire. En 2021, elles ont fait l’objet d’un programme de restauration exemplaire qui a permis la renaissance d’une zone humide.
« À la fin des années 2010, lorsque le syndicat des eaux du Cézallier s’est lancé dans la rénovation de son réseau d’eau potable et de ses conduites qui dataient des années 1950, l’Agence de l’eau a demandé à ce que le trop-plein (NDLR : soit 1,25 millions de m3 sur les 2.5 millions de m3 captés par an) qui était délesté treize kilomètres plus bas dans la vallée, soit restitué à proximité de la source », raconte Emmanuel Correia, maire d’Anzat-le-Luguet. Sollicité pour trouver une solution, le Conservatoire d’espaces naturels d’Auvergne (CEN) repère qu’il existait autrefois une zone humide, juste en aval de la source, qui avait été drainée pour accélérer l’écoulement et faciliter la fauche et le pâturage. Après avoir ausculté de vieilles cartes et des photos satellites, le CEN propose de restaurer le fonctionnement ancien de l’eau.
Retenir l’eau en altitude
Propriétaire d’une partie des terrains, la municipalité s’engage avec enthousiasme dans le projet. « Garder l’eau un maximum de temps sur le territoire est une question de bon sens. Il s’agissait de recréer le paysage d’avant-guerre », avance Emmanuel Correia dont la commune est engagée dans la transition écologique depuis plusieurs années.
En 2021, après avoir convaincu l’éleveur qui possède l’autre partie de la zone humide, le chantier est lancé par le Syndicat de gestion de l’Alagnon (Sigal) et le CEN. « Nous avons comblé les fossés avec les merlons de curage restés sur place, retracé des écoulements pour retrouver des méandres. Au final, l’opération a coûté 65 000 € hors taxe, dont 50 000 € pour remodeler une piste et remplacer trois buses par des petits ponts. Ce projet est particulièrement intéressant car il a associé les acteurs du petit cycle de l’eau (NDLR : l’eau potable) et du grand cycle de l’eau (NDLR : à l’échelle du bassin versant) », détaille Émilie Dupuy du CEN Auvergne. Aujourd’hui, le Rayet a retrouvé sa zone humide qui stocke l’eau et le CO2. Récemment, la commune a même aménagé un sentier de randonnée pour admirer les tourbières et la cascade d’Apcher au débit retrouvé. (…)